Société militaire
société civile Création avril 2011

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SOCIÉTÉ MILITAIRE, SOCIÉTÉ CIVILE
À TOULOUSE AU xviiie siècle ;

DE L’ANCIEN RÉGIME À LA RÉVOLUTION
(vers 1740 – 1799)

Thèse de doctorat en Histoire présentée
par

Pascal ROUX

6 juin 1998
Université de Toulouse II Le Mirail
Unité de Formation et de Recherche d’Histoire, Histoire de l’art et Archéologie
Jean de Langautier a été en relation avec Pascal Roux à qui il a fourni des documents. Sont présentés ici les passages relatifs à la famille.
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Ce petit groupe d’officiers roturiers permet également de constater qu’il existe, comme dans la noblesse, une forte tradition militaire dans certaines familles. Le cas des Auriol-Langautier de Saint-Padou est assez intéressant. Cette famille cherche de toute évidence à s’agréger à la noblesse depuis le xviie siècle par son mode de vie : acquisition du fief de Langautier en Lauragais, qu’ils ajoutent à leur patronyme Auriol.

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Alliances matrimoniales dans la noblesse avec les Puybusque Saint-Padou (1708), dont ils relèvent le nom, puis avec les Montlezun (1745). Passage plus ou moins long dans l’armée à chaque génération. Font précéder leur nom dans les actes du terme « noble » depuis la fin du xviie siècle et portent des titres de noblesse (marquis, chevalier) à la fin de l’Ancien Régime. Attaqué sur la question de sa noblesse, Joseph d’Auriol, seigneur de Langautier, envoya dans les années 1770-80 une supplique au roi, réclamant son intervention. La noblesse de sa famille reposait, selon lui, sur son mode de vie, le service des armes et de l’Église, ainsi que sur les alliances nobles. Ce qui revenait à dire qu’il était dans l’impossibilité de présenter quelque preuve que ce soit.

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Il y a ceux qui ont passé leur baccalauréat, voire leur licence, avant de revêtir l’uniforme. Chez certains fils d’avocats, comme Boutaud ou Lafue d’Auzas, la vocation militaire a pu venir sur le tard à moins qu’ils aient dû convaincre leur famille de les laisser s’engager. Bacheliers respectivement en 1740 et en 1764, ils ont encore attendu trois ans avant de devenir officiers, à vingt ans passés. Cette réorientation en cours d’études est flagrante dans le cas de Jean-Charles-Philibert de Saint-Padou. Après sa maîtrise-es-arts (1764), ses parents le destinent à la prêtrise et l’envoient comme clerc tonsuré au séminaire de Saint-Sulpice, à Paris, en septembre 1766. N’ayant pas la vocation, il revient à Toulouse au bout de deux ans et « tourne en rond » manifestement pendant cinq ans avant d’entrer dans les gardes du corps de Monsieur en 1773 .

Informations communiquées par M. de Langautier

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Aucun garde du corps ne paraît avoir repris du service dans la foulée. Jean-Charles-Philibert-Antoine de Saint-Padou a bien postulé à une place dans la gendarmerie, mais il n’a pas été agréé.

[] Dans presque tous les cas rencontrés, la démission a lieu en août ou en septembre 1792, ce qui est vraisemblablement une manière de répondre à la prise des Tuileries et à la destitution du roi. Les différents cas de figures précédents ne concernent au bout du compte qu’une minorité de personnes. Pour la plupart, les officiers ont quitté leur régiment sans tambour ni trompette. Après avoir constaté leur absence prolongée, le ministère finit par procéder à leur remplacement au bout de quelques mois. En fait, il n’est pas rare de retrouver nos « déserteurs » à Toulouse où sur leurs terres quelques semaines plus tard. C’est ainsi que le marquis de Saint-Padou, parti en congé en avril 1791, est rayé du contrôle de son régiment parce qu’il a refusé de prêter le serment exigé des officiers après Varennes. Bien souvent cependant, l’abandon précède de peu l’émigration.

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Jean-Charles Philibert Antoine d’Auriol-Langautier de Saint-Padou : Garde du corps du Roi avant la Révolution, Auriol-Langautier habitait surtout Paris, et Vendine , où il possédait une maison. On le rencontre principalement dans ces deux communes entre 1789 et 1792. En 1791, il postula à une place d’officier dans la gendarmerie de la Haute-Garonne, mais sans succès . Remarqué au club dès février 1792 par son hostilité aux insermentés, il y distribua le 24 avril, au moment de la déclaration de guerre, un recueil de chants patriotiques, se proposant de les apprendre en particulier aux « Dames qui embellissent la salle  ».

Vendine dépendait du comté de Caraman, avant d’être rattachée au diocèse de Toulouse en 1779, puis au département de la Haute-Garonne en 1790. Par la suite, il habita épisodiquement à Toulouse, 15 rue du Taur, chez Deville, perruquier (1793), et surtout à Loubens.

Auriol-Langautier se distingua au cours de ces années par ses excès patriotiques et anticléricaux, peut-être pour faire oublier qu’il portait du « chevalier de Saint-Padou » à l’époque du Tyran et que sa famille cherchait à s’agréger à la noblesse depuis 150 ans. Il fut nommé, après la crise fédéraliste, commissaire délégué de l’administration du département. Dans ses différentes missions, il eut régulièrement maille à partir avec les autorités locales. Les administrateurs du district de Revel l’accusèrent d’être manipulé par ses voisins de campagne. Ceux de Verfeil se plaignirent de ses abus. Envoyé dans ce district au début de l’année 1794 , il y sema la terreur avec son collègue Barateau. Ils auraient, en particulier, brandi la menace de la guillotine pour se faire remettre des volailles à bas prix. Son anticléricalisme violent, ses propos virulents indisposèrent également les populations qui tirent échec à son action par leur mutisme. Après la chute de Robespierre, il ne fut pas oublié par ceux qu’il avait brimés. L’Antiterroriste classe « Langotier, ci-devant garde du corps, administrateur du département » parmi les terroristes à pourchasser. Sur la plainte des habitants de Verfeil, le représentant thermidorien Mallarmé le fit interner à la Visitation le 2 nivôse an III (22 décembre 1794).

Il avait été nommé commissaire du département au district de Verfeil le 13 pluviôse an II (1er février 1794).

Il était cependant élargi un mois plus tard. On retrouve par la suite cet officier à différents postes. Agent municipal de Caraman le 3 pluviôse an III (22 janvier 1795), il signe des adresses, prononce des discours « énergiques » lors des plébiscites de l’an III et de l’an VI. Lors de l’insurrection royaliste de l’an VII, il fut nommé commissaire délégué par l’administration du canton de Caraman pour rechercher les délits commis par les « brigands royaux ». Cependant, ses convictions n’étaient pas que de circonstance. Sous le Consulat, il est fiché comme « anarchiste ». En 1815 encore, on l’accuse d’avoir brûlé le drapeau blanc. Notons enfin, qu’en dépit des différends idéologiques qui l’opposaient à son frère aîné François, il usa de sa position pour le protéger. Celui-ci, en effet, avait des convictions royalistes affichées et il émigra assez tôt. Afin de lui éviter les désagréments réservés aux émigrés,

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il intervint auprès de diverses administrations pour qu’elles produisent de faux certificats, sur lesquels les prénoms des deux frères étaient intervertis. Le 31 mars 1792, c’est la commune d’Auriac qui accorde un certificat de résidence et de non-émigration. Le 7 ventôse an 11 (25 février 1794), la municipalité de Caraman fournit un certificat identique. Comme il le rappela plus tard à son frère, « c’est moi qui (..) écrivis à Canut, alors maire de Vendine, pour l’engager de m’inscrire sur le registre des habitants de cette commune comme commandant de la garde nationale dudit lieu sous vos véritables prénoms et non sous les miens C’est donc moi qui vous évitai le danger que l’administration centrale ne vous inscrivit sur la liste générale des émigrés du département dans un temps surtout Où vous courriez les plus grands risques (..). C’est moi qui m’occupais à Paris (..) de votre radiation définitive ». Toutes ces interventions évitèrent que les biens de la famille de Langautier (dont avait hérité François en tant qu’aîné) ne fussent saisis. Si Jean Charles Philibert Antoine prit tous ces risques, ce ne fut pas uniquement à cause des liens du sang qui l’unissaient à un émigré. Étant peu riche, il réclama par la suite à son frère une partie du patrimoine familial en raison de tous ces services .

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AURIOL-LANGAUTIER de SAINT PADOU (Marie Philibert Antoine d’) Famille bourgeoise du Lauragais, qui acheta la terre noble de Langautier en 1632 et chercha dès lors à s’agréger à la noblesse. Né le 9.01.1 ; † à Toulouse vers 1774.

Fils aîné de Joseph (1709-1793), lieutenant dans Noailles-inf., et de Marie Marguerite Françoise de Montlezun. Célibataire.

Officier dans Jarnac-Dragons vers 1765.

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AURIOL-LANGAUTIER de SAINT PADOU (Marie François Joseph, chevalier d’)

Né le 16.03.1748 à Toulouse (Saint-Etienne) ; † le 14.07.1832 à Toulouse.

Frère de Marie Philibert Antoine.

Sous-brigadier puis brigadier dans la 1e Cie franche des gardes du corps du roi de 1760 à 1764. Étudiant à l’université de Toulouse, bachelier en droit le 19.07.1766. Volontaire dans la légion Corse le 16.03.1770 ; Sous-lieutenant dans Jarnac-Dragons (devenu Deux Ponts dragons) le 1.06.1772 ; réformé le 11.06.1776 ; remplacé sous-lieutenant le 20.04.1778 ; lieutenant en 2d le 31.07.1782 ; passé dans les Chasseurs de Flandres le 17.03.1788 ; lieutenant en 1er le 17.05.1788 ; obtient un congé le 1.04.1791. Abandonne son emploi ayant refusé de prêter le serment.

Émigré en Espagne en octobre 1791 ; fait campagne en Allemagne à l’année des Princes, Cie des dragons d’Artois, sous les ordres du comte Descars ; a cessé de servir le 31.12.1792, époque à laquelle il est revenu en France ; repassé en Espagne en 1797 rentré en France en 1799, il participe à l’insurrection royaliste de l’an VII ; breveté CNE de cavalerie le 23.09.1815, avec rang du 1.10.1791. Retraité à Toulouse avec 600 francs le 11.11.1816. Décoration 1 chevalier de Saint-Louis le 26.10.1814.

AD. 3 : E 922, p. ; 1 J 760, état des chevaliers de Saint-Louis en 1 ; SHAT 3 pensions 1801-1817, 174 ; BAOUR, 1782- ; FERTE ; archives personnelles de M. Jean de Langautier.

AURIOL-LANGAUTIER de SAINT PADOU (Jean Charles Philibert Antoine, chevalier d’)

Né le 21.03. 1749 à Toulouse (St Étienne) ; † le 2.02.1825 à Loubens (31)

Frère des précédents. Marié le 11.08.1793 à Paris avec Victoire Coulon (1750-1828), fille de Simon et d’Anne d’Auriol-Langautier.

Étudiant à Toulouse, maître-es-arts le 12.07.1764 ; clerc tonsuré au séminaire de Saint-Sulpice à Paris de septembre 1766 à août 1768.

Garde du corps de Monsieur, Cie de Lévis, le 1.01.1773 ; passé garde du corps du roi, Cie d`Artois en 1779 ; en fonction au début de la Révolution.

Fut candidat à une place dans la gendarmerie de la Haute-Garonne en 1791. Nommé commissaire délégué de l’administration du département en 1793 ; commissaire pour le district de Verfeil le 1.02.1794 ; interné à la Visitation le 22.12.1794 ; élargi le 30.01.1795 (figure sur la liste des terroristes publiée par le journal L’anti-terroriste après le 9 thermidor ; agent municipal de Caraman en l’an III ; commissaire délégué par l’administration du canton de Caraman pour rechercher les délits commis par les « brigands royaux » en l’an VIII.

Domicilié à Paris, rue Jacquet (1779-92) ; à Toulouse, 15 rue du Taur (pendant la Révolution), ainsi qu’à Vendine (31).

A.D. 3 : I L 953, 11 ; SHAT : 76, p, 17/ ; L’Anti-terroriste, an II ; archives personnelles de M. Jean de Langautier.